
La théologie est simplement la discipline intellectuelle et spirituelle qui cherche à articuler, comprendre, interpréter et systématiser les croyances d’une tradition religieuse, en se fondant sur ses sources de « révélation » et en dialogue constant avec la raison et l’expérience humaine. C’est une foi en quête d’intelligence (fides quaerens intellectum, selon l’expression de Saint Anselme). Elle n’est pas la foi elle-même, mais l’effort rigoureux pour en penser le contenu, la cohérence et les implications.
Pourtant cet effort d’éclaircissement et de synthèse ne s’effectue pas en cabinet de lecture où l’exégète isolé se plonge dans des interrogations de métaphysicien. Il répond aux chocs et aux différents frottements qu’éprouvent les membres de l’Eglise, vivant souvent sans confort « l’interface » des valeurs que cette communauté vit soutient et valorise, lorsqu’ils sont aussi plongés dans un monde différents et parfois hostile.
Il y a donc un permanent travail de relecture critique et d’interrogation, dont le but est re rétro-éclairer le fond traditionnel et de réinterroger la « pastorale ». La pastorale étant la « façon de faire », la pédagogie de l’Eglise, pour accorder au mieux à l’exigence religieuse, les conditions de vie de ses membres, et son adresse au monde extérieur.
Au delà d’une confortation pure et simple et frontale d’un certain donné intangible de la vérité, établi lentement de cette façon, la visée est de découvrir et exprimer les significations nouvelles, jusque-là cachées, de ce ferme dépôt. Il rebondit ainsi en actualité et inspire des voies d’action qui sont le résultat de la présence des chrétiens dans la cité, puisqu’ils en font remonter les interrogations.
Ce que nous essayerons de faire, c’est de tenter de dégager des questions implicites que le monde moderne soulève, lorsqu’il s’adresse à l’Eglise en lui demandant, souvent par confort, un simple acquiescement au « progrès », et de les réinstaller, d’une façon peut-être inattendue, dans le fond des sources de réflexion à partir desquels cette communauté a le devoir de faire avancer et mettre en valeur sa tradition.
A partir de là, nous essayerons de produire quelques étincelles (plutôt que d’en faire!) en espérant que le lecteur y trouvera le bien fondé d’une direction propre et nouvelle à son travail, et la motivation pour rejaillir avec énergie et espérance quant à son résultat! A la suite de Jacques Ellul nous recherchons une vraie présence de l’Eglise au monde.
Bien loin de l’applaudissement automatique à l’humanisme, qui n’est qu’une facilité de crédit à laquelle Dieu est invité à se plier pour se rendre assimilable, il s’agit d’être l’occasion d’une certaine verticalisation des questionnements humains, lorsque l’Homme fait retour sur lui-même. Car inévitablement, un jour ou l’autre, intuitivement « repris par la patrouille », un soupçon finit par peser sur la consistance réelle de tout « main stream » qui lui est tendu, dans lequel il est tenté commodément de s’abandonner de se résigner au risque de s’abîmer.